Il y a 12 ans, au même stade de la compétition, la France avait déjà eu toutes les peines du monde à se défaire du piège roumain. Elle n’avait dû son salut qu’à un coup de tête (du sort ?) de Christophe Dugarry. Un but de guerrier qui avait à l’époque sauvé les apparences d’un jeu déjà très carencé.

Hier, face à des Roumains il est vrai peu enclins à produire du jeu, les Bleus auront manqué de (presque) tout. Certes, le climat très lourd qui pesait sur Zürich n’était pas propice aux grandes envolées, mais jamais on n’a senti les Français capables d’accélérer le rythme afin d’enflammer une rencontre soporifique.

Pire encore, cette entrée en lice constitue même une vraie régression dans le jeu français. Car si l’assise défensive a encore une fois été au rendez-vous –même si on a déjà connu la doublette de latéraux Sagnol-Abidal beaucoup plus convaincante- et si le duo Toulalan-Makélélé a rayonné dans l’entre-jeu, c’est avant tout offensivement que les Bleus ont pêché.

Manque de créativité, de vitesse. Mais surtout manque de rage. Cette fameuse grinta dont "Duga" était l’un des garants, et qu’on n’a pas retrouvé hier, à l’image de l’apathique duo Anelka-Benzema ou encore d’un Malouda dans la lignée de sa saison décevante avec Chelsea. Le Guyanais semble avoir perdu la percussion qui faisait jadis sa force : il ne passe quasiment plus en un contre un et son relation privilégiée avec Abidal est restée du côté de Gerland.

Dans cette équipe, l’étincelle aujourd’hui ne semble pouvoir venir que de Franck Ribéry. Il aura ainsi fallu attendre la 22ème minute et le… 2ème ballon seulement de "Ti Franck" pour ressentir une esquisse de frisson. Et c’est également lui sur un débordement côté droit qui offrit la plus belle occasion française à Benzema, ce dernier butant finalement sur Lobont.

Bien sûr, chaque match a sa propre vérité, mais si l’on compare la première rencontre de ce groupe C avec le choc que fut, trois heures plus tard, Pays Bas-Italie, les Français ont vraiment beaucoup de soucis à se faire pour cet Euro 2008. Bataves et Transalpins ont tout simplement appliqué ce qu’il a tant manqué aux hommes de Raymond Domenech, à commencer par –on y revient toujours- la vitesse, arme indispensable du football moderne.

Face à des Italiens vieillissants (près de 30 ans de moyenne, la plus âgée du tournoi), les Bataves ont impressionné, confirmant surtout leur exceptionnel potentiel offensif (sans Babbel, ni Robben !). Mais paradoxalement, c’est grâce à un choix plutôt défensif que Marco Van Basten a remporté son duel avec son homologue Donadoni. Titulaire inattendu dans un rôle de vigie du milieu de terrain, le géant (1,98 m) méconnu de Twente Engelaar, a fait régner la terreur dans le rond central, réduisant au silence le trident du Milan AC Gattuso-Ambrosini-Pirlo.

Côté italien, ce match a surtout démontré à quel point l’emblématique capitaine Fabio Cannavaro était indispensable à la Squadra Azzurra, par sa seule présence et la confiance qu’il insuffle à ses partenaires. Sans son chef de file pour couvrir ses carences, le lentissime Materazzi a presque frôlé le ridicule face aux feux-follets Sneijder et Van der Vaart. Et sans Buffon, irréprochable malgré les trois buts encaissés, le score aurait pu être encore plus important.

Attention toutefois de ne pas enterrer trop vite les Champions du Monde italiens. Car si les attaquants transalpins sont restés muets, c’est surtout par manque de réalisme et (un peu) de chance. Malgré cette lourde défaite (la plus sévère de son histoire en phase finale de Championnat d’Europe), je pense que l’Italie conserve toutes ses chances de qualification… au vu des prestations de ses futurs adversaires. Aux Roumains de nous prouver le contraire ! Quant aux Bleus, le match de vendredi contre des Bataves redevenus ogres revêt donc une importance capitale pour la suite des évènements. L’heure des tâtonnements est terminée. Il est temps, Messieurs, de passer à l’action. Enfin...

Jà-Phi